Coupe Jules-Rimet

Trophée de la coupe du monde 1930-1970

La première édition de la coupe du monde a lieu en 1930. Le trophée, créé par le sculpteur français Abel Lafleur, prend le nom de coupe Jule Rimet en 1946, du nom du dirigeant français, président de la FIFA, connu pour être le père de la compétition. En 1970, après 40 ans de bons et loyaux services, le trophée est offert au Brésil, premier triple vainqueur de l’épreuve.

Jules Rimet demande à un sculpteur de la région parisienne, Abel Lafleur, de réaliser le trophée de la coupe du monde. Il se rend chez lui en 1928, muni de 50 000 francs (1). Il explique à l’artisan : « Mon cher Lafleur, lui dit-il sans détour, la coupe doit être en or massif, non par ostentation mais en tant que symbole. La Coupe du Monde doit être la première parmi les manifestations et l’or est le symbole de la primauté ». Rimet rend régulièrement visite au sculpteur qui esquisse peu à peu son œuvre. Il en résulte une statuette en argent fin plaqué or à l’effigie de Nikè, déesse grecque de la victoire, portant un calice octogonal. Elle repose sur un socle rectangulaire en lapis lazuli sur lequel des plaques en or sont posées, destinées à accueillir le nom des vainqueurs. Le trophée pèse 3,8 kilogrammes pour une taille de 35 centimètres.

Lors de son départ pour l’Uruguay et la première coupe du monde à la fin du printemps 1930, Jules Rimet emporte la précieuse coupe avec lui. Avant la guerre, ce sont José Nasazzi (Uruguay, 1930), Gianpiero Combi (Italie, 1934) puis Giuseppe Meazza (Italie, 1938) qui ont le bonheur de le soulever. En 1946, le trophée est rebaptisé Jules Rimet en l’honneur du dirigeant français. C’est l’Uruguayen Obdulio Varela qui s’en empare en 1950, suivi de l’Allemand Fritz Walter en 1954. En 1958, le socle est agrandi pour accueillir le nom des nouveaux vainqueurs. Le Brésil, par deux fois en 1958 (capitaine Bellini) et 1962 (capitaine Mauro Ramos) puis les Anglais en 1966 (capitaine Bobby Moore) sont tour à tour champions du monde. L’édition de 1970 voit un duel de doubles champions du monde : le Brésil (1958 et 1962) affronte l’Italie (1934 et 1938). L’enjeu est double, puisqu’en plus de la victoire, le vainqueur, en devenant le premier triple vainqueur de la coupe du monde, pourra conserver le trophée à titre définitif. Ce sont les Brésiliens qui s’impose (4-1) et le trophée pense prendre une retraite bien méritée à Sao Paulo.

Mais la retraite du trophée ne sera pas heureuse, à l’image d’une vie qui a connu bien des péripéties, que soit pendant la guerre ou lors de son passage en Angleterre.

Recherchée par les Nazis pendant la guerre,…

Après ses succès en 1934, puis en 1938, la fédération italienne conserve le trophée dans le coffre-fort d’une banque de Rome. La guerre empêche l’édition suivante de se dérouler. Adof Hilter, grand amateur de ce genre symbole, veut s’en emparer, d’autant plus qu’il n’a pas apprécié les performances de l’Allemagne, éliminée par la Suisse en 1938. Le Fuhrer charge les hommes de la Gastapo de le lui ramener. Le président de la fédération italienne, Ottorino Barassi, sentant la menace planer retire le trophée de son coffre-fort et le cache chez lui, dans une boite à chaussures qu’il met sous son lit. Lorsque les sbires d’Hitler viennent fouiller sa maison, il joue l’innocent et explique que la coupe a été déplacée sans pouvoir dire où. Les Nazis ne trouvent pas la coupe qu’Ottorino Barassi ne ressort qu’en 1950 lorsque la coupe du monde se joue à nouveau.

… volée lors d’une exposition à Londres puis retrouvée par un chien…

En 1966, c’est en Angleterre que se déroule la huitième édition de la coupe du monde. Dans les mois précédents l’épreuve, le trophée est la principale pièce d’une exposition philatéliste qui se tient au Westminster Central Hall. Mais dès le deuxième jour, le 20 mars 1966, le trophée est volé pendant la pause des agents de sécurité. Le docteur Martin Atherton, auteur du livre The theft of the Jules Rimet trophy (Le vol du trophée Jules Rimet) explique : « L’ensemble de l’affaire relève de l’amateurisme : le fait que la FA ait laissé sortir le trophée, les dispositions de sécurité mises en place et même la récupération du trophée. Par exemple, l’un des agents de sécurité était âgé de 74 ans. Une preuve que le dispositif de sécurité était tout à fait inadéquat. Je pense que deux personnes sont entrées par une sortie de secours, ont pris le trophée et sont reparties comme elles étaient venues. »

Prise de panique, la Fédération Anglaise commande avec la plus grande discrétion une réplique à l’orfèvre George Bird. Alors que la FA met Scotland Yard sur l’affaire, une demande de rançon est faite. Un certain Jackson contacte Joe Mears le président de Fédération et lui demande 15000 livres en petites coupures pour récupérer le trophée. Sur les conseils des enquêteurs, Mears accepte et fait parvenir sa réponse à travers une petite annonce dans le London Evening news du 24 mars : « Prêt à faire affaire. Joe ». Lors de l’échange, prévu à Battersea Park, Jackson récupère la rançon, sans se rendre compte que le sac ne contient que quelques billets cachant des liasses de papier. Il explique qu’il n’a pas le trophée et qu’il faut aller le chercher ailleurs. Le policier qui a procédé à l’échange le suit en voiture, mais finit par l’interpeler lorsqu’il se rend compte que Jackson tente de le semer. Lors de son interrogatoire au commissariat de Kennington, il décline sa véritable identité, Edward Betchley, déjà connu de la police pour des actes de délinquance. Par contre, il n’a pas le trophée et explique avoir agi pour une tierce personne, appelé le « Polonais » qui ne sera jamais retrouvée. Betchley écope de deux ans de prison (pour demande de rançon) et meurt un an après sa libération en 1969. La seule piste menant au trophée semble perdue…

C’est un petit chien du nom de Pickles (Cornichon en anglais) qui va sauver l’Angleterre. Son maître, David Corbett, sort de son appartement le soir du 27 mars vers 21 heures pour aller passer un coup de fil dans une cabine téléphonique. Il en profite pour promener son chien Pickles, qui est attiré par un paquet dans un buisson. La suite, c’est Corbett qui la raconte : « J’allais justement à la cabine téléphonique parce que la femme de mon frère attendait un bébé (…) J’ai pris le chien pour lui faire faire un peu d’exercice et il a continué à courir au pied d’un buisson situé sur le côté de la voiture de mon voisin (…) Il reniflait un paquet près de la roue avant. Il était très bien emballé dans du journal – l’IRA était en action à cette époque et je me suis dit que c’était une bombe. Alors je l’ai ramassé. Posé. Je l’ai ramassé, reposé. Et puis finalement j ‘ai arraché un peu le fond et j’ai vu un socle où il était écrit Brésil, Allemagne, Uruguay. J’ai arraché l’autre extrémité et c’était une dame qui tenait un plat au-dessus de sa tête. Je l’ai tout de suite reconnue et j’ai pensé “Ça y est, c’est la Coupe du monde ! » »

Pickles devient un héros national. On lui offre un an de nourriture gratuite, il est élu chien de l’année, reçoit de nombreuses médailles, est à l’affiche d’un film (L’espion au nez froid)… Il est même convié au banquet fêtant la victoire des Anglais après la finale de la coupe du monde. Son maître reçoit une récompense de 5000 Livres, un total supérieur à la prime offerte aux joueurs anglais pour leur titre mondial. L’histoire de Pickles s’arrêtera pourtant un an plus tard. Lors d’une promenade avec le fils de Corbett, il s’échappe pour courir après un chat, sa laisse s’accroche à un arbre et il meurt étranglé. David Corbett enterre l’animal dans le jardin la maison qu’il a pu s’offrir avec la récompense.

… avant de disparaître définitivement au Brésil

« Un tel vol ne serait jamais arrivé au Brésil. Même les voleurs brésiliens aiment le foot et ne commettraient jamais un tel sacrilège ». Ce sont les mots du président de la Fédération brésilienne lorsqu’il apprend le vol de la coupe en 1966. Ce jour-là, le Brésilien aurait mieux de se taire, car des malfaiteurs, probablement brésiliens, dérobent la coupe du monde dans les bureaux de la Fédération brésilienne le 19 décembre 1983. La Fédération disait qu’elle gardait le vrai trophée dans un coffre, et exposait une réplique dans ses bureaux. Mais c’est bien le vrai qui était exposé à la vue des visiteurs, celui caché dans le coffre n’étant qu’un leurre destiné à tromper d’éventuels voleurs. Cependant, les malfaiteurs sont bien au courant de cette supercherie et n’ont qu’à forcer l’arrière de la vitrine, pourtant à l’épreuve des balles, pour mettre la main sur l’objet du délit. Dans les jours qui suivent, quatre hommes sont arrêtés, puis condamnés. Mais le trophée n’est jamais retrouvé. La Fédération brésilienne commande une réplique, réalisée par Eastman Kodak. Elle est faite de 1,8 kilogrammes d’or.

En 1997, la Fédération anglaise met en vente la réplique créée en 1966 pour remplacer le trophée volé avant qu’il ne soit retrouvé. La FIFA mais aussi la Fédération brésilienne se portent acquéreur, espérant secrètement qu’il s’agit de la vraie coupe que les Anglais auraient conservée en secret. C’est la FIFA qui remporte la mise pour une somme de 254000 Livres, alors que l’objet n’était estimé qu’à 20000. Mais après expertise, il s’avère que ce trophée était bien la réplique confectionnée par Georges Bird en 1966.

L’histoire connait un dernier soubresaut en décembre 2014. Un employé de la FIFA retrouve dans un espace de stockage le socle d’origine de la coupe du monde, celui qui avait été remplacé après l’édition de 1954 pour accueillir le nom des vainqueurs. Ce socle est maintenant exposé au musée de la FIFA.

FICHE D’IDENTITE

  • Créateur : Abel Lafleur (1930)
  • Matières : Argent plaqué or,
  • Hauteur : 35 centimètres
  • Poids : 3,8 kilogrammes
  • Vainqueurs : Uruguay (1930 et 1950), Italie (1934 et 1938), RFA (1954), Brésil (1958, 1962 et 1970), Angleterre (1966).

SOURCES

NOTES

(1) Le kilo de pain vaut environ 0,20 franc en 1930

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